

Histoire d'un four publié le 07/07/2022 - mis à jour le 03/12/2022

Du four à la fresque, une restitution antique.

Un matin d’automne, un collègue bien avisé présenta le projet aux élèves de CAP maçon.
Ceux-ci, passée une période dubitative et interrogative, se sont emparés du projet dans sa globalité.

Le projet de départ était de réaliser des murs antiques en pierre, à la façon des Romains, pour y appliquer des enduits capables de recevoir des fresques d’inspiration antique (décor mural réalisé à l’aide de pigments sur enduit frais).
Sans perdre de vue les finalités du chantier d’archéologie expérimentale, très vite, l’équipe s’est posée cette question :

Nous allons faire des murs comme les Romains, pour ne pas faire nos reconstitutions sur des matériaux modernes, mais la chaux que l’on trouve est, elle aussi, fabriquée de manière industrielle ! Alors pourquoi ne pas fabriquer notre chaux ?

Voici donc le récit en images des étapes du projet Aquitania Ornata vu de l’intérieur.

Première étape : préparer l’atelier, implanter les futurs murs en pierre grâce aux plans imaginés . Les élèves ont dû lire les plans, comprendre les côtes et les reporter en fonction des points de référence de l’atelier.

Lorsque l’implantation est terminée, il faut commencer à bâtir.

Dans le même temps il faut commencer le terrassement à l’emplacement du four ; les élèves ont utilisé la forme du terrain naturel pour définir l’emplacement exact.

La livraison de pierre tombe à pic, elle va permettre aux élèves de continuer à bâtir les murs.

Aussitôt livré, c’est effervescence. Tout le monde est impatient de rajouter sa pierre à l’édifice.

Le mur prend forme au fur et à mesure que les jours passent.

Il ne faut pas oublier de graver le nom du projet dans la pierre, celle choisie dépassait les 100 kilos !

Lorsque le mur atteint les dimensions requises, il est temps de préparer la phase d’enduit.

Dans le même temps, la construction du four se termine, ça tombe bien, ça va pouvoir chauffer ! Il ne lui manque que son enduit terre pour parfaire l’étanchéité à l’air et pouvoir transformer tous ces blocs de pierre (CACO3) en chaux vive (CAO oxyde de calcium) qui donnera à son tour de la chaux éteinte (CA(OH)2 hydroxyde de calcium) une fois hydratée.

Le lundi 30 mai, c’est le grand jour, les derniers préparatifs sont enfin terminés et à 14 heures l’allumage du four est effectué sous l’œil attentif des élèves et des acteurs du projet : l’excitation est à son comble !

La cuisson de la chaux a demandé une alimentation constante (toutes les 7 min env) et une surveillance permanente. Pour le retour sur expérience, nous avons pris soin de mesurer la température quasiment toutes les 20 min au thermomètre laser, mais aussi de prendre des clichés à la caméra thermique.

La température de 900°, indispensable à la réussite de la transformation de la pierre en chaux est atteinte lors du troisième jour de chauffe. Il aura fallu pas moins de cinq jours de chauffe pour notre résultat.

Pendant ce temps à l’atelier, les préparatifs pour la fresque sont en cours : Maud Mulliez, la fresquiste, réalise les dernières couches d’enduit sous l’œil attentif de Mathilde Carrive, notre maîtresse de conférence et coordinatrice du projet.

Les dernières couches, à base de granulats très fins, sont appliquées minutieusement. Les élèves sont encadrés par les chercheurs et participent très activement aux travaux de recherches.

La fresque romaine ne s’improvise pas et demande une certaine dextérité, comme en témoigne le coup de main remarquable de Maud Mulliez, travaillant ici à la reproduction d’un candélabre.

Les élèves ont pu découvrir et s’exercer eux aussi à la reproduction de la fresque, tout en respectant les motifs inspirés de décors de l’époque.

Cette expérience fut excessivement riche en apprentissage, pour les élèves, mais aussi pour tous les autres acteurs du projet. Le partage et les discussions autour des résultats ont suscité une émulation au-delà de nos espérances ; de nombreux groupes d’élèves et leurs enseignants nous ont rendu visite et se sont profondément intéressés au projet et à ses avancées.

Mais l’expérience sera reconduite avec la construction d’un deuxième four à chaux dont nous sommes dès aujourd’hui persuadés d’avoir une meilleure maîtrise. Les expériences sur la fresque seront également mises à l’honneur, grâce à une ouverture tout public pour les journées européennes du patrimoine.
Pensez dès aujourd’hui à réserver votre W.E du 17 et 18 Septembre 2022 si vous voulez nous rendre visite pour pouvoir observer tous les travaux entrepris pendant ce temps fort de notre établissement.

Nous remercions tous les acteurs engagés qui ont contribué au bon déroulement du projet Aquitania Ornata qui s’avère être une réussite à bien des points de vue.

Nous remercions particulièrement la Région Aquitaine, l’université de Poitiers, l’ensemble des acteurs de l’EREA Théodore Monod et son directeur M. Baron.
Nous remercions également les fournisseurs de matériaux, les carrières CMGO 17 pour les blocs de pierre bruts, les Carrières de Thénac et de Saintonge pour les pierres de taille et la chaux, la scierie Hillairet et fils de Meursac pour les conseils et le bois.

Mathilde Carrive, Arnaud Coutelas, Thierry Gregor, Maud Mulliez, Victorien Revillé
Crédit photographique :