Conférence d'Eloi Coly publié le 15/05/2013  - mis à jour le 05/06/2013

Une rue de Gorée

L’île de Gorée

En face de Dakar, une petite île, Gorée, est connue pour son climat et son architecture des plus agréables mais pas seulement...

Découverte en 1444 par le navigateur portugais Dinis Dias, l’île de Gorée occupe une position stratégique face aux Amériques ce qui fera d’elle un lieu privilégié pour le commerce triangulaire.
Les maisons des esclaves sont des lieux symboliques, mémoire de la traite négrière. Elles étaient aux mains des "Signares" (contraction de signora en portugais) qui en disposaient soit pour commercer soit pour louer la maison à des marchands d’esclaves.

La maison des esclaves

L’architecture particulière des maisons était pensée en fonction de son utilisation : à l’étage la maison des maîtres (les signares ou les marchands), au rez-de-chaussée, les cellules où étaient parqués les esclaves.

Les jeunes filles séparées des femmes étaient les mieux loties, non qu’elles aient eu plus de valeur, mais les marchands descendaient régulièrement en choisir une pour leur tenir compagnie. Une fois enceintes, ces jeunes femmes étaient alors affranchies.
Les enfants de 7 à 17 ans étaient parqués dans deux cellules mitoyennes. Les marchands ne les prenaient pas plus jeunes car il fallait être endurant pour supporter une longue traversée. Ces enfants, pour certains, finissaient en Europe comme serviteurs ou enfants de compagnie. Quant aux hommes, s’ils pesaient moins de 60 kg, ils étaient alors isolés des autres et gavés de niébé (repas à base de fèves). Si malgré ce traitement, leur poids restait insuffisant, ils étaient vendus moins cher comme domestiques en Afrique.

Le départ pour le "Voyage sans retour"

Ensuite certains prenaient la porte du « Voyage sans retour », porte étroite qui donnait sur l’océan. Les grands navires ne pouvant accoster en raison des rochers, les esclaves embarquaient sur des petites barques pour les rejoindre, enchaînés deux par deux, avec un boulet de 10 kg accroché à la chaîne. Certains choisissaient de mourir et se jetaient à l’eau entraînant l’autre avec eux. Les malades étaient balancés par dessus bord, vivants, pour éviter toute contamination. Les abords de l’île de Gorée ont vite été infestés de requins.

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Et aujourd’hui ?

Le conférencier rappelle aussi le contexte historique, les responsabilités des uns et des autres : des religions aveugles et consentantes, des chefs africains et des Européens avides de richesses, des métis qui en 1789 écriront dans les cahiers de doléances non pas pour demander la libération des Noirs mais pour obtenir le droit de commercer eux-aussi. Il rappelle qu’à l’époque un enfant était échangé contre un miroir et qu’aujourd’hui un autre enfant travaille encore au lieu d’apprendre à l’école. Il nous rappelle enfin que la discrimination est encore et toujours présente et qu’il est de notre responsabilité de la combattre.


Pour Eloi Coly sa venue le 4 avril est très symbolique puisque cette date est le jour de la Fête de l’Indépendance au Sénégal.
Il nous offre une vision des plus réalistes des conditions de vie des esclaves capturés à l’intérieur de l’Afrique et aussi une leçon : celle de la tolérance et de la lutte contre toutes les formes de discrimination.